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Et pourtant elles tournent !!!

L'étude des espèces de foraminifères planctoniques actuelles peuvent nous donner des indices pour résoudre les énigmes paléoclimatiques passées, mais peuvent aussi nous aider pour mettre en place une taxonomie. Voir descriptif détaillé

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Le Projet

Etude de l’enroulement de foraminifères dans les reconstructions climatiques
Marc Testé – 20/03/2015

Les foraminifères planctoniques, ont été décrits par Alcide d’Orbigny dès 1826 comme des céphalopodes miniatures, puis en 1835 comme des organismes unicellulaires par Félix Dujardin. En systématique, ils sont régis par le CINZ (Code Internationale de Nomenclature Zoologique), classés dans le sous-ordre des Globigerinina qui appartiennent aux unicellulaires rhizaires et qui sont groupe-frères des Actinopodes (radiolaires). Ces unicellulaires secrètent un test calcitique qui est enroulé, chez la plupart des genres, avec des loges successives à foramens communicants. Les types d’ouvertures, la forme des loges et le contour du test sont des caractères diagnostiques chez ces taxons.

C’est le test minéralisé des foraminifères qui va leurs assurer une bonne préservation fossile. Leur rythme rapide de spéciation et leur abondance dans les sédiments dès je Jurassique en font un bon outil biostratigraphique. Leurs préférences écologiques en font d’excellents marqueurs des paléoenvironnements. Mais plus que leurs occurrences relatives, c’est leur profusion dans les sédiments marins qui confère aux foraminifères une utilité statistique. Des paramètres comme les variations d’abondance, les variations biométriques, ou encore les variations temporelles et spatiales ont pu être corrélé avec des variations paléoenvironnementales.

Comme déjà indiqué ci-dessus une majorité d’espèces de foraminifères planctoniques actuels et fossiles, construisent un test enroulé, dit de type trochospiralé. Ces tests sont nommés ainsi puisque possédant une face spirale ou apex (sommet) et une face ombilicale ou ombilic. L’observation du sens horaire (dextre) ou antihoraire (senestre) de l’enroulement de la face spirale détermine le sens d’enroulement du test.

Figure.1 - Formes dextre-senestre

En fonction des espèces de foraminifères, cette répartition des sens d’enroulement des tests peut être répartie de manière équilibrée (autant de dextres que de senestres), en partie ou totalement déséquilibrée (biaisée – un sens d’enroulement est supérieur à l’autre, voir exclusif) au sein d’une même espèce. Dans l’actuel, la moitié des espèces de foraminifères ont un type d’enroulement équilibré. Toutefois il existe aussi des formes de foraminifères dont le rapport des deux enroulements est variable au cours du temps. Ce sont ces espèces qui nous intéressent pour le propos de cet article. En effet, ce sont les espèces de ce type de rapport d’enroulement qui vont pouvoir être corrélée aux variations climatiques des eaux de surfaces. Nous traiterons ici de l’espèce Neogloboquadrina pachyderma.

Dès 1960, Bandy et Ericson démontre que chez l’espèce de foraminifère Globigerina pachyderma (aujourd’hui nommée N. pachyderma), le sens d’enroulement majoritaire de la population locale est fonction de la température. Dans les eaux actuelles, les formes senestres de N. pachyderma sont préférentiellement réparties dans les eaux froides des hautes latitudes, tandis que les morphotypes dextres sont plutôt réparties dans les eaux de surfaces plus chaudes (tempérées).

Figure.2 - Distribution des morphotypes

A la suite de ces descriptions, les rapports de population d’enroulement de N. pachyderma ont été et sont utilisés pour déterminer les paléo-températures relatives des eaux de surface. L’utilisation de cette espèce dans les sédiments a également permis de définir les phases glaciaires et interglaciaires qui ont eu lieu au cours de l’Holocène. L’étude de cette espèce est donc un outil bioclimatique pour les sédiments pliocènes – actuels, et il peut être corrélé aux données géochimiques comme le δ18O de leur test ou bien autres microfossiles comme les palynomorphes.

Toutefois des études génétiques récentes sur des parties d’ARN de cette espèce ont permis de montrer que les deux morphotypes possèdent des génotypes différents et appartiennent donc à deux espèces distinctes. La répartition entre les formes dextres et senestres correspondrait donc à une préférence écologique de ces espèces distinctes. L’espèce affiliée aux eaux froides aurait préférentiellement un enroulement senestre et l’espèce plutôt affiliée aux eaux chaudes, un enroulement dextre. Ce partage de caractères à l’identique, où la différence morphologique n’est exprimée que par le sens d’enroulement fait des morphotypes de N. pachyderma des espèces cryptiques.

Dans l’actuel, la notion d’espèce cryptique est liée au développement des analyses génétiques. Cette discrimination n’est donc à priori possible que pour l’actuel ou le sub-récent, l’information génétique n’ayant pu être conservé passé 100 000 ans. Toutefois, des études isotopiques sur N. pachyderma ont permis de mettre en évidence une réponse différente à l’assimilation de l’oxygène dans le test des deux morphotypes, par des mesures de δ18O. Ces différences indiqueraient un effet vital propre aux morphotypes et confirmeraient donc les données génétiques de deux espèces différentes.

Figure.3 - Données isotopiques sur N. pachyderma

Par l’ensemble de ces données sur l’espèce N. pachyderma, aujourd’hui séparée en deux espèces distinctes, il a été possible de montrer l’intérêt d’étudier l’enroulement différencié d’espèces de foraminifères pour étudier les variations climatiques mais également l’importance que pouvaient avoir ces études sur la taxonomie et la systématiques des groupes actuels. Reste à savoir maintenant si ces découvertes pourront être adaptées à une recherche micropaléontologiques dans les sédiments plus anciens et leurs fossiles dans un but de construire un nouveau proxy paléoclimatique voire biostratigraphique.

Photos / Vidéos

Figure.1 - Formes dextre - senestre

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